
Deuil autour des cas de conscience Plus de parole pour ces Présidents africains !
Deuil autour des cas de conscience Plus de parole pour ces Présidents africains !...
La probité morale, la sincérité, la grandeur d'esprit d'un homme se mesure à l'aune de sa parole concrétisée par les actes. Pour faire court, l'homme, c'est sa parole. Malheureusement, il se développe sur le continent une caste de dirigeants qui ont perdu cette notion élémentaire qui sert de base à l'éducation. « Pour que la démocratie progresse en Afrique, il faut nécessairement limiter les mandats présidentiels à deux ou à trois » a déclaré Faure Gnassingbé du Togo au Forum économique germano-togolais à Munich en Allemagne le lundi 13 juin 2016 sur Deutsche Welle. Mais celui-là est son 4ème mandat et certainement qu'il va continuer son aventure à la tête du Togo.
« Tout au long de ma carrière, j'ai toujours accordé une importance particulière au respect de mes engagements. En conséquence, j'ai décidé de ne pas être candidat en 2020. Cela a été un honneur de servir mon pays », a déclaré Alassane Ouattara le jeudi 05 mars 2020 devant les 352 parlementaires réunis en Congrès dans l'amphithéâtre de la Fondation Félix Houphouët-Boigny à Yamoussoukro. Cet ancien haut fonctionnaire international n'a pas hésité à ravaler sa parole arguant un cas de force majeure après le décès de son supposé dauphin Amadou Gon Coulibaly. Dans le sang de plusieurs dizaines d'Ivoiriens, Ouattara est dans son 3ème mandat à la tête de la Côte d'Ivoire après le scrutin du 31 octobre.
Profitant d'une audience qu'il a accordée vendredi 1er avril 2016 à Mohamed Ibn Chambas, envoyé spécial du Secrétaire Général des Nations Unies en Afrique de l'Ouest, le Chef de l'Etat guinéen, a été on ne peut plus clair: « Vous savez, tous les jours, quand j'écoute la radio à Conakry, j'entends les gens m'accuser d'être l'instigateur des crises en Guinée. Mais quand j'entends ça, j'en ris. Car ceux qui me dépeignent ainsi ne me connaissent pas. On ne peut pas avoir mené le combat que j'ai mené et se mettre, une fois qu'on a le pouvoir, à faire de la provocation. Cela ne me ressemble pas. Mais quand on est président, on accepte beaucoup de choses et on ne répond pas à toutes les accusations. Et c'est la même chose à propos du débat qui, pour moi, est prématuré au sujet d'une éventuelle modification constitutionnelle. Non ! Si je me tais sur ce qui se passe ailleurs, c'est pour ne pas gêner d'autres présidents qui, quelque fois, sont des amis. Mais en ce qui me concerne, je ne modifierai jamais la constitution. Ce serait trahir ce pourquoi je me suis toujours battu. Cela doit être clair. En Guinée, il n'y aura pas un troisième mandat.»
Cet ancien vieil opposant n'a pas aussi sourcillé pour sodomiser la loi fondamentale pour s'offrir un 3ème mandat, là aussi dans un bain de sang au détour de la présidentielle du 18 octobre 2020.
A ces trois noms entre autres qui ont refusé d'entrer dans l'histoire par la grande porte, il faudra désormais ajouter un certain Patrice Guillaume Athanase Talon. Pendant la campagne électorale et après son élection en 2016, le successeur de Yayi Boni déclarait « Je ferai de mon mandat unique une exigence morale en exerçant le pouvoir d'Etat avec dignité et simplicité. Je m'acquitterai de mes devoirs de Président de la République avec humilité, abnégation et sacrifice pour le bien-être de tous », telles ont été les déclarations du Président Talon lors de son investiture le 06 avril 2016.
Cinq ans plus tard : «Ce que les Béninois défendent avec acharnement, ce n'est plus seulement deux choses ; c'est maintenant trois choses : démocratie, nos libertés et la bonne gouvernance. Pour ma part, je resterai dans l'action permettant de renforcer la bonne gouvernance. Je serai candidat à cause de ça », a déclaré le même Talon le 17 janvier dernier lors de sa tournée pré-campagne au sud du pays.
Après son investiture, l'ancien satrape gambien Yahya Jammeh avançait que Talon a fait cette promesse faute d'expérience en tant que Chef d'Etat et au tout jeune et frais président béninois de lui répondre : « c'est vrai que le pouvoir tente, corrompt et finit par vous transformer », mais il « ne pense pas que le pouvoir changerait » sa nature.
Contrairement à la lignée de Gnassingbé, Condé, Ouattara, Talon brigue son 2ème mandat. Mais en un mandat et au regard de ses coups de boutoir assénés à la démocratie en caporalisant toutes les institutions, rien n'est moins sûr qu'il s'arrête de sitôt dans ses rodomontades.
Des manifestations politiques avec morts d'hommes, il faut remonter un peu plus loin dans l'histoire politique béninoise. Malheureusement, le peuple béninois a vécu cela au cours de ce qui devait être l'unique mandat du fils du cheminot de Ouidah.
Quand on prend les déclarations et contre déclaration de ces Chefs d'Etat, garant de la souveraineté du peuple, de l'unité nationale et des institutions de la République, on en vient simplement à la fâcheuse conclusion qu'ils n'ont plus de parole.
Et lorsque l'autorité suprême n'a plus de parole, cela érode tout simplement le peu de confiance de la population qu'elle est censée diriger. C'est tout de même regrettable que dans cette ère de modernité où les dirigeants s'entichent à être des modèles pour leur peuple, d'autres malheureusement sous les tropiques optent pour la marche à reculons et le deuil autour de leur conscience.
Kokou AGBEMEBIO